159è jour : Tranovice - n. Becvou (enfin je crois car sur la carte c'est pas évident)
18 septembre 2011
67,3 km, 6808 km au total
Le réveil à 6h est un moment fantastique, oui sincèrement. La vue est magnifique et je peux prendre le temps d'apprécier et de photographier le lever de soleil sur la montagne : magique. Les lumières de la ville en face s'éteignent petit à petit. Les couleurs passent du rouge orangée au jaune plus clair, les nuages participent à la beauté du décor, bref c'est superbe.
Le fait d'avoir dormi au quasi sommet de la colline nous a exposé au vent et ce matin miracle tout est sec, pratique et beaucoup plus agréable pour plier.
Le trajet du matin est plutôt sympathique même s'il se finit étrangement. Nous avons rejoint une route nationale finalement pas désagréable : au moins c'est lisse, direct et le relief est modéré. A un moment elle passe en 2X2 mais avec une vitesse limitée et pas d'interdiction aux vélos. On continue tranquillement sans souci, au moins il y a de l'espace pour nous doubler, c'est presque moins dangereux qu'une seule voie. Là où c'est moins drôle c'est qu'à une bretelle d'insertion on voit le panneau tant haï : interdit aux vélos. Du coup on est un peu embêtés. Officiellement il n'y a pas de moyen de sortir de cette route mais le panneau indique néanmoins qu'on n'est pas autorisés à rouler dessus. C'est un paradoxe : on est déjà dessus et on avait le droit et maintenant on n'a plus le droit d'y être mais pas de moyen d'en sortir... on sort donc par la bretelle d'entrée... il faut dire qu'il n'y a pas grand monde et que c'est Hélène qui ne veut pas poursuivre sachant l'interdiction mais... une belle erreur puisqu'on se tape une méga descente sur un petit chemin tout caillasseux et la remontée du même acabit en face... alors que la voie rapide a un super pont qui enjambe le relief. On est dégoutés.
Le petit plaisir c'est de découvrir un peu plus loin une piste cyclable qui semble mener au centre de Novy Jicin. On a déjà 45 km au compteur et à 11h30 on se pose le long de cette piste, à l'ombre d'un arbre, dans un champ de maïs fraîchement coupé.
On déguste nos sandwiches en regardant les cyclistes qui passent et qui eux-même nous dévisagent longuement. A un moment une dame s'arrête et commence à discuter avec nous. Son anglais est assez catastrophique mais on arrive malgré tout à expliquer un peu notre périple... et elle les siens, car Erina est une voyageuse aussi. On est dimanche, elle se balade à vélo mais hier encore elle était à Rome. Elles est revenue en bus dans la nuit après plus de 15 jours de vélo en Sicile. Au bout de quelques minutes elle nous propose de venir profiter de sa salle de bains et prendre un café. On accepte mais on a besoin d'un peu de temps pour finir notre déjeuner et ranger nos affaires. On essaye de lui demander son adresse elle ne comprend pas trop et repart donc chez elle toute seule en nous disant qu'elle repasse nous chercher dans 20 minutes.
Une demi heure plus tard nous laissons donc notre vélo dans son petit jardin qui est situé dans un regroupement de jardins appartenant aux habitants d'un immeuble un peu plus loin. Marrant comme concept : des immeubles d'un côté et des paquets de jardins de l'autre. Pourquoi pas.
Nous montons donc chez elle et pendant qu'elle bouge un peu ses affaires de cycliste qui prouvent qu'elle revient bien de vacances :) et qu'elle prépare le café nous profitons donc de la salle de bain. Avec nos plans foireux de campings de ces derniers temps c'est bien agréable... même si avec la difficulté de compréhension de ce qu'elle voulait qu'on fasse on se retrouve donc chez elle avec juste nos affaires de valeurs et pas de vêtements de rechange. Tant pis, ça fait partie du lâcher prise du voyage : on remet les mêmes affaires et on sourit car on est propres !
Avant le café, on trinque avec un petit verre d'un alcool bien serré genre vodka mais qu'elle a visiblement fait elle même ! Na zdravi
en Tchèque. Il est 14h et on a encore de la route à faire. On a à un moment cru qu'elle voulait qu'on reste dormir chez elle mais c'est juste qu'elle confondait bedroom et bathroom. Elle est mi-infirmière mi-secrétaire médicale mi-bibliothécaire si on a bien compris et en tout cas ce soir elle travaille à l'hôpital.
Le café est précédé d'un grand verre de sirop et accompagné d'un verre de coca cola local dont elle est fière. Elle a sorti aussi plein de petits gâteaux en s'excusant de son frigo et placards un peu vide étant donné qu'il y a encore quelques heures elle était en vacances à l'autre bout de l'Europe. On discute un moment, partage des infos sur nos pays respectifs pendant qu'elle nous sort toujours plus de trucs avec lesquels on doit repartir : ce qu'elle n'a pas utilisé pendant son périple (vitamine C, barres de céréales, boîtes de conserve de salades type saladière...). On passe un moment vraiment génial et on a un grand plaisir à échanger avec elle. Hier je parlais de sourds-muets, aujourd'hui encore on a une barrière de la langue parfois très hermétique mais on s'en sort honorablement dans un mélange de plein de langues différentes (un peu d'allemand), beaucoup de gestes et un petit dictionnaire aussi :)
Avant de repartir elle allonge la liste de nos cadeaux avec une brioche et des petits pains puis un t-shirt de vélo pour Hélène pour pas qu'elle ait froid et un foulard pour se protéger la tête !!!
On repart à la fois très contents et un peu gênés de tant de gentillesse et de générosité mais c'est encore une fois une énorme satisfaction sur la bonté de l'être humain. Ca fait tellement de bien de voir que la réalité c'est aussi ça et pas uniquement comme la télé aimerait nous le faire croire (si on en avait une) des jeunes qui incendient des bagnoles, des braquages, des viols et des meurtres.
Comme ça ne suffit pas, Erina ressort son vélo pour nous accompagner quelques kilomètres pour nous montrer le chemin optimal pour nos prochains kilomètres. En reprenant notre vélo dans son jardin elle alourdit notre embarcation d'une bonne demi-douzaine de pommes et le double de prunes. Ensuite elle met le grand plateau et entreprend de nous démontrer que 2 fois 30 ans ne valent pas 60 ! Car du haut de son âge avancé comme elle le dit ("l'année prochaine je refais une expédition mais après c'est fini !" mon œil !!!) elle nous mène la vie dure : on peine à la suivre, elle carbure pendant qu'on transpire et que chacun de notre côté on pense "mince on va encore être bons pour la douche ce soir". C'est loin d'être plat et dans les montées on en bave bien comme il faut.
Au bout de 15 km elle s'arrête quand même car il faut qu'elle refasse le trajet dans le sens inverse avant d'aller ensuite à son travail. Il nous reste 4/5 km avant de rejoindre le camping qu'on a repérés ensemble sur la carte.
On se dit au revoir rapidement mais c'est vraiment le genre de rencontre qu'on gardera longtemps dans notre cœur. Le genre dont le lendemain au réveil on pourrait se demander "mais je n'ai pas rêvé ?" et en voyant une pomme, les photos ou le t-shirt qu'elle a donné à Hélène on saura que non. Autant de gentillesse et de générosité en si peu de temps c'est déroutant, on ne sait pas comment réagir tout en étant aux anges en même temps. Avec l'incompréhension on flotte totalement, on accepte de se laisser bercer "je crois qu'elle a dit ça mais on verra bien, et puis de toute façon c'est tellement chouette que quoi qu'il se passe on aura passé un bon moment". Que ce soit une douche et un café ou une nuitée on s'en fiche, l'important c'est l'instant, le moment qu'on accepte de passer, qu'on s'autorise à passer et le moment dont on aurait pu ne pas profiter en disant "non tout va bien on a besoin de rien" quand elle nous a demandé si on voulait venir prendre une douche chez elle.
La suite est un peu moins rose car nous ne trouvons pas le camping. Ca commence à être une de nos spécialités. On demande à un bar qui est d'après la carte qu'on a vue un peu plus tôt juste à côté. On nous dit "heu je crois que c'est gauche, puis droite et tout droit" mais bien sûr rien ne correspond. On essaye quelques routes avant d'abandonner et de rejoindre... un champ. Juste à côté de la ligne de chemin de fers et pas loin d'un lac (moustiqueesssssss) mais on s'en fout un peu en fait, on est sur notre petit nuage.
160è jour : n. Becvou - Kromerize
19 septembre 2011
62,9 km, 6871 km au total
Bon ok on était un peu trop prêt de la ligne de chemin de fer... malgré les bouchons d'oreilles leur passage a eu tendance à nous réveiller plusieurs fois dans la nuit. Ah le long train de marchandises... Enfin, avec ces longues nuits, malgré les coupures et réveils intempestifs on dort suffisamment pour être reposés.
Le vent frais du matin nous apporte un bon côté : tente sèche ! heureusement car le soleil reste couché et la consultation de la météo sur l'ordinateur d'Irena hier ne nous avait pas donné de bonnes nouvelles pour la journée.
Nous reprenons notre circuit le long de la Becva (prononcer bètchva). Le circuit est vraiment magnifique, ça alterne entre de vraies pistes cyclables de bonne qualité et des petites routes de campagne. En longeant au plus près de la rivière le relief est quasi inexistant, c'est appréciable. Sauf... eh oui il y a un "mais", à un endroit où pour une raison qui nous échappe la piste s'éloigne et emprunte un chemin caillouteux (il y a bien les petits panneaux qui indiquent qu'on est sur le bon chemin)... ah les cailloux ça n'est rien, c'est juste la pense phénoménale qui fait qu'on a même du mal à pousser le vélo !!! Je suis assez nul pour estimer les pentes et on a oublié de regarder le compteur du vélo mais en gros on prend presque 150 mètres d'altitude en quelques minutes à cracher nos poumons. Et forcément une fois en haut la première chose que fait la route c'est redescendre au niveau de la rivière ! On aurait préféré la route nationale sur ce coup là...
La suite est de nouveau très agréable même si la pluie vient se mêler de notre voyage. On s'abrite parfois quelques minutes mais globalement c'est surtout un petit crachin qui débarque à l'improviste et s'arrête quand on s'harnache contre la pluie.
On route bien et un peu avant midi on tombe sur un grand magasin de vélo. Ca tombe bien car ça fait quelques jours qu'avec le retour du froid (notamment le matin) je peste de nouveau contre un de nos bidons qui se remplit via une ouverture qui se clipse (et non pas se visse) et qui pète vraiment les doigts. Je pensais le changer avant d'en avoir vraiment marre, c'est donc parfait car la boutique est bien achalandée et je repars non pas avec un mais deux bidons neufs. Il y en a un second qui avait le même principe, en un peu moins pénible "mais quand même" et qui était plus que fatigué. Je profite aussi de ce pays moins cher que la moyenne pour acheter des patins de frein de rechange. On n'a pas usé ceux changés en Norvège mais autant en avoir des de rechange à 4 euros qu'à 8 (prix des Shimano en France si je me souviens bien).
On fait aussi nos premières courses dans un supermarché Tchèque, c'est donc un grand moment. On visite Albert même s'il y a un Tesco en face, ça nous donne l'impression d'être plus local. Les tarifs sont un peu plus élevés qu'en Pologne mais on trouve des tas de produits super. Des gâteaux sympa, des conditionnements intéressants, des compotes, du vrai Nescafé en poudre fine... il manque juste le thé vert menthe. Je tente le Tesco pour vérifier, pas mieux :( grrr
C'est d'ailleurs l'occasion de faire une petite comparaison entre la Pologne et la République Tchèque : on sent très nettement une différence de niveau de vie du pays. Ici il n'y a plus de maisons sans crépi ni rambarde, c'est plutôt peinture fraiche. Pour notre plus grand plaisir il y a aussi pas mal de maisons à toit plat... les villages sont mieux entretenus et on voit tous ces petits détails qui manquent en Pologne : des fleurs dans des bacs le long des routes, les abris bus, les petits aménagements urbains genre pistes cyclables... Les jardins sont bien entretenus mais plus sobres (pas les merdouilles du genre nains), les terres agricoles semblent mieux entretenues aussi (difficile à décrire, ça se ressent). Depuis le passage de la frontière on revoit aussi des panneaux solaires et même plusieurs fermes solaires de tailles tout à fait respectables. Les Fiat 126 ont cédé la place aux Skoda Octavia et les panneaux pour indiquer la station "d'autoroute FM" remplacent ceux de Radio Maria. Les prix sont donc aussi un peu plus élevés mais on retrouve le concept de super et d'hypermarché qui semblent encore un peu étrangers à la Pologne où la "sklep" (la micro épicerie) règne en maître.
Après notre ravitaillement c'est sous une petite pluie qu'on repart et qu'on se retrouve en quête d'un endroit où déjeuner... ah lala le genre de moment pas cool. On est sur une nationale, pas d'arrêt de bus, pas envie d'aller se mouilles les fesses dans un champ... il est aussi plutôt tard donc pas idéal pour sortir tout le camp de romanichels c'est à dire monter la tente pour y pique-niquer abrités (et pas envie non plus de la replier mouillée alors qu'elle était sèche ce matin). C'est donc... devant un transformateur électrique qui a une petite avancée et qui nous coupe du vent que nous allons inaugurer nos jolis bidons neufs. Pour limiter le goût de plastique nous leur offrons... du Tang ! Ah la merveilleuse boisson au goût chimique. On n'en trouve plus en France depuis pas mal d'années mais ça existe toujours. Peut-être que ça ne passe pas les inspections sanitaires ou qu'il y a des composés interdits en France... allez savoir, en tout cas nous ça nous amuse toujours autant et ça me rappelle furieusement le pichet en plastique Tupperware de la caravane de mes parents quand nous partions en vacances quand j'étais gamin.
Nous dégustons également 2 petites pâtisseries : un feuilleté à la pâte de pruneaux plutôt pas mal et un genre de beignet à la cannelle pas mal non plus.
Notre transformateur nous offre 2 avantages, outre se protection contre la météo :
- une vue imprenable sur le manège de camions qui vident des bennes et des bennes de terre sur un champ (on ne comprend pas bien)
- une vue imprenable sur le passage à niveau et celui des trains. On pense beaucoup à notre neveu Sacha et on en profite pour faire des photos pour lui. Oui à 3 ans et demie c'est un grand fan de rails et de tout ce qui va avec. Il maîtrise même toutes ces petites subtilités que sont caténaire et pantographe.
Nous repartons un peu rapidement à notre goût mais si on veut sortir de cette nationale et trouver un endroit pour bivouaquer avant la tombée du jour il nous faut anticiper.
Pour ce qui est de quitter la nationale en fait ça se fait plus tôt que prévu en raison d'un tronçon fermé qui entraîne tout un tas de petites déviations dans les villages avoisinants. On se prend même à donner des conseils à des automobilistes un peu perdus ! en Tchèque bien sûr.
On rejoint Hulin puis Kromeriz au GPS car c'est un peu un imbroglio de routes, notamment une autoroute et par le plus grand des hasards on voit un panneau "cyclokemp". On se demande ce que c'est mais le nom nous plait bien. On ne sait pas trop pourquoi cyclo mais en gros c'est un terrain de sport qui prête ses vestiaires et un bout d'herbe. Après nos recherche infructueuses de camping ces derniers jours on se dit que c'est quand même un bon moyen d'avoir une douche chaude et surtout de quoi faire une lessive parce que bon depuis Cracovie ça commence à faire long...
La douche chaude est à peine tiédasse et pour cause le gérant a allumé les ballons d'eau chaude devant nous... oui inutile de préciser qu'on est seuls sur ce beau complexe sportif... Pour la lessive je vais chercher la popote pour la remplir d'eau tiède de la douche et la ramener jusqu'aux lavabos. Comique. Heureusement que ça n'est pas trop cher...
La petite soupe du soir est bien appréciable car il fait bien frais et surtout avec l'humidité ça n'aide pas. On a ressorti les doudounes ce midi, c'est un signe !
On arrive à chopper du wifi ce soir depuis la tente, il s'agit d'un opérateur téléphonique qui propose un truc avec abonnement mais il y a un "essai gratuit". On ne sait pas combien de temps ça dure et surtout c'est ultra limité (pas de ftp pour mettre en ligne du texte ou des photos, pas de chat et même pas de gmail ou le moindre site sécurisé). En tout cas ça nous suffit pour réussir à contacter un nouveau couch surfeur à Brno (où nous devrions être demain) car celui qu'on a contacté à Cracovie n'a jamais répondu. Espérons qu'on aura une réponse d'ici demain soir... et si c'est positif on a une longue journée de vélo devant nous car il doit y avoir quasiment 70 km pour rejoindre le centre de Brno. Du coup au plumes de bonne heure !
161è jour : Kromerize - Tvarozna
20 septembre 2011
56,0 km, 6927 km au total
Il a plu toute la nuit et quand le réveil sonne ça n'est toujours pas la joie. La météo récupérée hier soir indiquait de la pluie jusqu'à 5h et une amélioration ensuite donc on part plutôt confiants et on accomplit nos petits rituels en croisant les doigts pour pouvoir démonter la tente et harnacher le tandem au sec. C'est bien ce qui se produit, pour notre plus grand plaisir. Par contre on se rend bien compte avec le temps méga gris qu'on a également perdu des minutes de jours le matin. A 6h on ne voit pas grand chose (lever du soleil théorique : 6h34 à Vienne). De ce côté aussi il va falloir s'adapter.
On est prêts à repartir et c'est de nouveau le grand flou concernant notre relation avec le gérant du terrain de sport. Il ne parle pas un mot d'anglais, même pas les 30 mots qui pourraient lui être utiles dans son métier genre "clé, signature, oui, non, passeport..." Il y a encore un peu de boulot à faire pour le tourisme :-) On récupère quand même notre caution pour la clé des sanitaires et on gagne une carte routière plus précise pour aller en direction de Brno (ah oui au fait, ça se prononce comme ça se prononce :-)
Brno c'est donc notre objectif aujourd'hui. Grosse journée car il y a environ 67 km donc probablement autour de 70-75 dans la réalité. C'est pour ça qu'on ne traine pas. On n'a pas encore de réponse de notre couchsurfeur mais on a bon espoirt (son taux de réponse est de 100%, mais ça veut pas pour autant dire qu'il dit oui à 100%, juste qu'on saura ou non si on est les bienvenus chez lui ce soir).
La météo est assez pourrie finalement, il crachinouille toute la matinée et le relief est un peu de retour. On envie l'autoroute et la ligne de chemin de fer qui occupent les meilleures places et ont les meilleurs aménagements du type "pont au dessus du précipice" quand de notre côté on descend et remonte de l'autre côté. Le plafond nuageux nous laisse penser qu'il est 7h du matin toute la matinée, pas très agréable.
On sent qu'on se rapproche d'une grosse ville car les bourgs traversés sont de plus en plus conséquents. On tente à quelques reprises le wardriving pour checker nos mails, mais signe objectif que la Republique Tchèque est un pays plus avancé que la Pologne : il y a deux fois plus de points d'accès wifi mais 90% sont protégés :-( Pas cool pour nous.
Un peu avant midi (11h48, 2h48 de vélo, 48,8 km parcourus, moyenne 18,0 km/h et 48,8 km/h en pointe [ça ne s'invente pas]), on se trouve un champ pas trop pourri et cette fois on monte la tente, on joint l'utile (séchage) à l'agréable (protégé du vent et de la pluie). On tente même un séchage de notre lessive sur le tarp à plat, mais après 2h on doit bien admettre qu'à part l'aérer (et c'est déjà pas mal pour limiter le développement bactérien) il n'a pas séché d'un iota. Oui faut dire que faire une lessive alors qu'on sait qu'il ne va pas faire très beau ça parait pas super logique... mais continuer à porter les mêmes fringues pendant plus d'une semaine ou les stocker sales dans un sac ça ne l'est pas vraiment beaucoup plus !
Une vérif en Edge de nos mails nous apporte la mauvaise nouvelle : pas de couchsurfing ce soir. 2è plan qui tombe à l'eau. Comme il est un peu tard pour tenter de contacter quelqu'un d'autre et qu'il nous faudrait du wifi on laisse tomber et prévoit donc de trouver à bivouaquer assez près de Brno (mais pas trop non plus) pour rejoindre le centre demain, visiter dans la journée et repartir avant la fin de l'après-midi pour retrouver à bivouaquer en périphérie.
Ca n'est pas sans nous apporter un petit brin de stress car trouver des coins bivouac en bordure de grande ville c'est toujours très sport : si on est trop loin on va prendre trop de temps pour rejoindre le centre demain matin et on n'aura le temps de rien faire, mais si on s'approche trop on ne trouvera nulle part ou poser la tente. Et le moins drôle c'est que généralement plus on s'approche moins on trouve, donc en gros quand ça commence à ne plus le faire ça ne sert pas à grand chose de s'acharner, ça ne s'améliore jamais. Et comme on a horreur de rebrousser chemin... je vous laisse conclure.
Bref finalement notre après-midi ne devra pas faire plus de ... 10 km sans quoi on prendra de gros risques.
On replie donc tranquillement notre bardas et on repart presque déjà en regardant où on pourrait s'installer. Déjà à 20 km du centre ça commence à ne pas être génial. Les industries commencent à fleurir le long des routes principales et les champs ressemblent eux-aussi à des industries : des hectares de maïs sans le moindre accès, des champs de blé à perte de vue... moissonnés et déjà recouvert de purin pour les refertiliser (ah "épandage n°5" de Chanel). On va atteindre le point fatidique du croisement de notre route avec l'autoroute qui signe un peu la fin de tout espoir quand on décide d'obliquer plein nord pour s'éloigner un peu car on aperçoit au loin une petite église sur une butte et une micro forêt autour. En s'approchant on finit par trouver un coin sympa et presque calme. La vue est très chouette, il y a juste le bruit (berçant) du flot continu des voitures sur l'autoroute. Au moins il n'est pas tard et on a largement le temps de profiter de la fin de l'après-midi.
Bon côté batterie ça ne s'arrange pas. Visiblement notre pack de batterie qui sert à recharger l'iphone et l'ordi portable ne se recharge plus très bien. Il est vide, on le branche sur le 220V et hop la diode verte qui indique qu'il est plein s'allume presque aussitôt. Cette nuit je l'ai laissé dans les sanitaires du camping histoire de voir si c'était juste un problème de diode ou autre chose. Verdict ce soir : ça fait 20 minutes que j'écris et ça y est elle est de nouveau vide. Je n'y comprends rien. C'est pas cool du tout ça !
162è jour : Tvarozna - Rajhrad
21 septembre 2011
35,4 km, 6962 km au total
A 6h le ciel est clair, la journée s'annonce belle, c'est rassurant. Mais si on va réussir à le faire sécher ce linge. En même temps avec le programme qui consiste à visiter Brno c'est pas gagné pour étendre nos petites affaires au soleil.
En tout cas les rayons qui réchauffent la tente pendant qu'on plie c'est nettement plus agréable que la rosée glacée qui rougit les bouts de doigts !
Rejoindre Brno est une simple formalité, par contre rejoindre le centre de Brno s'avère un peu plus délicat. Tout d'abord on est dans les bouchons car on doit être à l'heure de l'embauche des gens et surtout le centre ville est en hauteur, en altitude oserai-je dire (désolé à ceux qui ont été à Katmandu si on a tendance à galvauder le terme altitude...).
La ville est plutôt sympa, quelques rues piétonnes, pas mal de vieux bâtiments parfois bien restaurés, l'atmosphère qui s'en dégage est agréable et la météo n'y est pas pour rien. Encore une ville où on sent qu'en hiver ça doit cailler sévère. Les publicités pour le triple vitrage et le fait de voir les doubles fenêtres partout nous laisse imaginer les longues soirées d'hiver au coin du feu...
Nous avons garé notre vélo un peu au pif, juste en face d'un resto qui semble local et très bien, on y retournera ce midi plutôt que de se lancer dans la course désespérée au restaurant bien et pas cher selon le "guide foireux de l'an dernier qu'il est déjà périmé le jour de sa sortie". On erre un peu au hasard des rues, tombe nez à nez avec une demi coque de bateau ou une cheminée de centrale nucléaire (va falloir creuser, pour ceux qui ont google maps sous la main), elle semble un peu à l'est dans la ville mais très très proche du centre quand même.
Après pas mal de détours on retourne donc à notre point de départ pour aller déguster quelques spécialités. Le serveur est plus que charmant et dans un anglais impeccable nous indique qu'il n'y a qu'une seule table près des prises électriques, qu'elle est occupée mais qu'on peut se mettre où en veut en attendant et aller la squatter dès qu'elle sera libre. Important, dommage qu'il n'y ait pas de wifi par contre :)
Hélène déguste donc un genre de filet mignon de porc avec des légumes grillés dans une crêpe salée, sauce moutarde pendant que de mon côté je déguste un pavé de bœuf rôti avec des airelles et surtout avec des knedliky. Je renoue avec cet accompagnement qui m'avait tellement surpris à Prague et qui continue de m'attirer, non pas que ce soit délicieux mais c'est juste surréaliste : en gros c'est du pain dans une pâte genre raviolis. Ils sont parfois aromatisés avec des petits morceaux de viande, des épices, herbes... ou de la pomme de terre histoire de rendre ça plus compact :) C'est formé en boulettes et généralement découpé en tranches histoire de ne pas s'étouffer :) En tout cas ça me fait bien plaisir de retrouver cette nourriture et Hélène est aussi ravie que moi, c'est très bon (merci Rolande, on pense à toi à chaque fois qu'on mange au resto).
Comme on a une petite envie de sucré et que la banane au caramel, mascarpone et menthe ne semble pas super locale, on se réoriente vers des knedlikys sucrés : au cottage cheese et aux fruits des bois. Là c'est une bonne rigolade car en fait le cottage cheese est intégré à la pâte qui doit faire un bon centimètre d'épaisseur. Imaginez un ravioli de 6 cm de diamètre et de cette épaisseur de pâte. Les fruits rouges n'ont plus beaucoup de place pour s'exprimer. Pour faire passer ce bon étouffe chrétien, ils sont délicatement déposés dans une sauce au beurre + sucre... avec un peu de chantilly aussi. Un peu riche mais finalement pas mauvais.
Nous repartons en titubants pour aller trouver du wifi histoire de mettre en ligne les photos que j'ai retaillées au resto. C'est Mc Do qui fournit l'accès (le ftp fonctionne ici, contrairement à Cracovie, allez comprendre). A force de trainer et de pester contre la batterie qui ne se recharge plus (je viens d'écrire au fabriquant histoire d'en savoir plus mais ça risque d'être rigolo s'ils me demande de leur renvoyer par courrier pour SAV...). donc bref on traine on traine et il est bien temps de partir. On renfourche donc notre pédalo et c'est parti pour une belle descente suivie de... bouchons : la sortie du boulot... grrr on croirait qu'on le fait exprès.
On enchaîne quelques kilomètres sans trouver de coin potable pour le bivouac. Un peu le même problème qu'hier : des champs ok, mais immenses sans le moindre arbre, la moindre haie, et comme tout est moissonné, labouré, purriné, ça ressemble plus à la surface de la lune qu'à un endroit accueillant pour poser la tente. Au bout d'un trop gros paquet de kilomètres on se trouve de quoi planter même si ça n'est pas génial. Il est presque 17h, le soleil est bas, il faut enchainer...
On est décalqués par la journée, je crois qu'aujourd'hui c'est l'automne et pourtant ici c'était une belle journée d'été. C'est un peu bizarre cette météo quand on voyage, qu'on change de latitude et de longitude en permanence. On ne sait pas trop à quoi s'attendre, on s'habitue à quelque chose (on a caillé début septembre, on s'est pris de la pluie et de la bonne grisaille de toussaint ces derniers jours) et maintenant c'est de nouveau l'été. Bon nous on préfère et visiblement la semaine s'annonce comme ça donc ça nous va très bien. Il faudra juste accepter les 8°C le matin... mais cette fois on tient le bon bout, notre linge va sécher, allez on y croit tellement qu'on va le laisser toute la nuit dehors car ça ne pourra pas être pire que maintenant !
163è jour : Rajhrad - Röhrabrunn
22 septembre 2011
63,8 km, 7026 km au total
Aujourd'hui la journée des 7000 km ! On quitte notre champ bien terreux et bien mou (et bien humide, pas génial en fait pour le linge qui n'a pas vraiment séché...) pour reprendre nos pérégrinations en direction de la frontière entre la République Tchèque et l'Autriche. On fait un petit stop pour liquider nos dernières couronnes tchèques et cédons au concept du "1 sachet de thé vert nature + 1 sachet de menthe pure"... C'est dingue comme d'un pays à l'autre c'est introuvable le "thé vert menthe", pourtant ce matin chez Tesco il y avait du thé vert caramel ou même cactus !!! mais pourquoi pas menthe ??? ça parait universel non ? C'est un tour d'Afrique du nord qu'on aurait du faire !
On passe les 7000 un peu avant la frontière qui arrive 10 kilomètres plus loin. Celle-ci ressemble assez à la frontière Norvège/Suède avec juste avant de quitter la Rep. Tchèque pas mal de supermarchés, casinos et autres lieux de commerce qui laissent fortement penser que les autrichiens viennent passer la frontière pour ravitailler et se détendre à moindre coût (tiens l'Autriche est en euro, cool ça fera des conversions, des grattages de tête et des frais bancaires en moins ! Sinon comme d'habitude RAS, on circule toujours aussi librement, aucune vérification d'identité, un simple panneau européen annonce le changement de pays.
Un peu plus loin nous pique-niquons avec déjà 50 km au compteur. Le relief qui est loin d'être absent nous laisse quand même la possibilité de rouler sans trop souffrir (hormis les fesse d'Hélène) et nous avons donc enchaîné pas mal de kilomètres ce matin. Ca conjugué au km effectués hier soir alors qu'on ne comptait pas trop dessus nous laisse penser qu'on sera en fait demain soir à Vienne et non pas dans deux jours.
On a eu une réponse négative d'un Warmshowerien et on a fait une seconde demande hier après-midi, on attend la réponse et on devra encore les recontacter pour indiquer qu'on risque d'arriver un jour plus tôt. On croise les doigts sinon ça risque un peu d'être comme à Brno.
En milieu d'après-midi Hélène a vraiment très mal au c*l et on décide donc d'arrêter nos bêtises et on stoppe à un peu moins de 64 km même s'il n'est que 15h30. Au moins ça nous laissera un peu plus de marge dans la soirée histoire de ne pas être aussi speed que ces derniers jours où la lutte contre la montre est vraiment permanente.
Ca laisse également un peu de temps pour bouquiner même s'il est vrai que ça on y arrive toujours, le soir une fois couchés. Après Contact, que je recommande donc, je viens de terminer un autre roman de science fiction : Isolation de Greg Egan. Un roman dit d'anticipation avec des idées sympa comme l'implantation dans le cerveau de modules d'amélioration de l'être humain. Imaginez que vous achetiez une calculette intra crânienne, ça pourrait être pratique parfois, mais ça pourrait aussi être un guide de voyage qui vous affiche en surimpression des infos sur ce que vous voyez, ou un mini ordinateur capable d'effectuer des traitements de données dans votre boulot afin de comparer des documents papiers plus rapidement à la recherche des différences... bref tout ça partait d'une bonne idée. La suite se corse nettement quand on commence à aborder la physique quantique et notamment cette fameuse expérience du chat de Shrodinger qui a marquée mon enfance : vous enfermez un chat dans une boîte opaque et dans la boîte vous mettez une fiole de poison reliée à un dispositif réagissant à la réception d'un photon (ou la conversion mécanique/électrique issue de la réception d'un photon).
Devant le bidule vous mettez un miroir semi transparent, donc qui laisse passer la moitié de la lumière et réfléchit le reste. Ok jusque là vous me suivez ?
Bon vous balancez UN photon sur le miroir... qu'est-ce qui se passe ? 2 possibilités, soit le miroir le réfléchit et rien ne se passe, soit il traverse le miroir, tombe sur le récepteur qui est placé derrière qui entraîne un mécanisme qui casse la fiole de poison et tue le chat.
La physique quantique rentre en action sur ce point là : tant qu'aucun observateur n'a été vérifié, le chat peut-être et est dans les deux états simultanés : vivant et mort.
Bon les physiciens ils fument des trucs très forts et écrivent des papiers que personne ne comprend pour renouveler les crédits qui leurs ont été octroyés hein ?
Dans mon bouquin ça se corse encore un peu quand on commence à parler pour une personne de la possibilité de se placer elle même dans un état "étalé" c'est à dire non "réduit" à une seule version d'elle même.
En gros vous êtes face à un problème, vous avez plusieurs manières de le régler, vous le réglez de ces différentes manières "en même temps" (ce sont vos différents états) et à la fin vous êtes réduits (par l'observation de quelqu'un d'autre) à la manière que vous avez finalement choisie pour régler votre problème. Coriace hein ? mais imaginez que vous puissiez manipuler ces états, c'est à dire choisir vous-même l'état final qui vous arrange en ayant testé ces différentes manières... attendez je prends un exemple du bouquin : on vous file un cadenas à 1 million de combinaisons, vous vous étalez en un million de versions de vous-même, chacune teste une combinaison et vous vous réduisez en une seule personnalité finale, celle qui a trouvé la bonne combinaison... et ça ne vous a pris qu'une seconde.
Bon je ne vous raconte pas tout mais c'est le genre de bouquin qui au choix vous fait vous arracher les cheveux pour y comprendre quelque chose, ou vous endort rapidement. Dans mon cas je ne sais pas trop...
Histoire de poursuivre sur du plus léger je me suis dit "tiens on va lire un truc de filles" : Anna Gavalda, Je voudrais que quelqu'un m'attende quelque part. Ah ben je m'attendais à du léger j'avoue que c'est un peu loupé. Intéressant en tout cas. Je suis un peu frustré de ne plus trop avoir le temps le midi de bouquiner des trucs plus utiles (j'ai toujours un bouquin de marketing en cours) car le soir avant de s'endormir c'est un peu un mauvais plan, celui qui incite plutôt à se creuser les méninges pour bosser les applications à ses propres problématiques qu'à fermer l'œil. Donc ce soir je m'endors sur Anna et ça sera très bien, mais pas cette nouvelle là parce qu'elle est trop triste, allez juste une dernière pour avoir quelques chose de plus positif... ah ben pas celle là non plus, c'est quoi cette fin à la con, bon allez, juste une vraie dernière...