Mardi, sur le siège passager d’une… voiture, quelque part sur l’autoroute entre Nantes et Bordeaux ça y est, je sens l’heure venue d’un premier bilan.
Une dizaine de jours donc que nous avons passé la ligne symbolique de l’avant et l’après voyage. 10 jours très bizarres, très étranges à définir et sur lesquels je vais essayer de communiquer un peu.
Quelques jours avant d’arriver j’évoquais cet espèce de tiraillement, de cisaillement entre deux sentiments opposés : envie de rentrer, de retrouver la famille, les amis, un peu de confort… et 180° plus loin l’envie de poursuivre parce qu’après 14 mois on se définit au travers du voyage plutôt qu’au travers de sa personnalité.
Désormais arrivés qu’en est-il ? Mêmes sentiments mais décalés vers l’avenir. Je crois que le voyage est derrière. Pour être transparents, sachez que le tandem n’a pas fait un tour de roue de la semaine et qu’enfin arrivés nous ne ressentons aucune envie de repartir. C’était génial, on en a profité à fond, on a passé des moments exceptionnels, d’une rare qualité mais on aspire désormais à se poser, ne serait-ce que pour recharger nos batteries qui ont bien morflé pendant le périple. On est rassurés que vous sembliez comprendre notre besoin de « vacances », on avait un peu peur de se faire rire au nez, mais je crois qu’on a su vous transmettre le côté « difficulté psychologique » du voyage, le manque de sécurité, de cocon, de repères, ce qui explique désormais notre envie de coocoon, de confort et de petits plaisirs aussi simples que le pyjama, que d’aller faire pipi la nuit sans avoir à mettre une doudoune et des chaussures, le fait de consulter le net sans se préoccuper de la facture salée, de prendre une douche « pour le plaisir »… ces petits riens reprennent une nouvelle valeur pour nous qu’on savoure doucement et délicatement.
A l’opposé donc, il y a ce nouveau tiraillement entre le besoin de se poser, d’assimiler et celui d’enchaîner, de se lancer dans les projets qui nous ont préoccupés durant le voyage, ce fameux « après » qu’il nous tarde de lancer.
Mais comment faire coïncider ces oppositions ? On cherche donc une voiture, mais d’un côté on est déjà gavés de la recherche alors qu’on n’a même pas été en voir une seule. On réfléchit « travail », on a des pistes, mais il est tentant d’y aller franco, allez zou on se lance… mais est-ce bien raisonnable ? Faut-il attendre un peu, attendre de reprendre doucement contact avec la réalité plutôt que de foncer tête baissée pour « éviter le coup de blues de la fin du voyage » ?
L’équilibre est dur à trouver. Penser au futur c’est déjà occulter les 14 mois précédents. Ne pas y penser c’est occulter le fait qu’on est quand même dans une situation relativement précaire et qu’il va falloir se bouger quand même…
Pour l’instant on s’impose donc un peu de calme, de détente, on s’empêche de se lancer trop vite dans les projets. On réfléchit aux voitures mais sans encore avoir contacté de vendeurs. On planche sur les pistes boulots, on « évalue le champ des possibles » sans pour autant concrétiser ça immédiatement. On s’impose des vacances. Ca a l’air con comme ça, probablement surtout pour ceux qui bossent qui aimeraient avoir ce petit plaisir aussi « si tu veux m’imposer des vacances n’hésite pas je suis partant 🙂 » mais c’est plus complexe qu’il n’y parait.
Il y a d’autres approches aussi, pour moi ça va être de me plonger dans les photos et vidéos du voyage afin de trier, retoucher, monter… histoire de prolonger l’instant, de rester en contact avec les mois précédents et d’adoucir la transition.
Il y a le nettoyage et rangement du matériel, ça fait un peu mal (et fondamentalement c’est plutôt chiant) mais ça aide à assimiler.
Et puis au milieu de tout ça il y a le bonheur et le plaisir de retrouver la famille et les amis. De se raccrocher à des choses qu’on connait, des lieux qu’on aime bien, qui nous aident à profiter du moment présent, à faire la transition et à ne pas se sentir dans le besoin impérieux de rusher vers la prochaine étape. Chaque chose en son temps, prenons le temps de construire un futur qui nous ressemble et non pas de réagir et subir une situation non désirée…